Escale prolongée

Première fois qu'il rencontrait quelqu'un qui appréciait son pouvoir, qui s'y intéressait. Drôle de fille...personne, dans son monde, n'avait eu cette réaction curieuse, admirative presque, quand il avait chopé le fruit dans le bar. C'était plutôt le contraire, puisqu'il avait blessé ses camarades de cale et de canons, s'était battu contre l'amiral, avait échappé à la mort puis s'était retrouvé la face contre le sol de ce nouveau monde. Il avait passé son temps à jurer contre ce pouvoir, et aussi contre lui-même, assez sot pour l'ingurgiter sans s'en rendre compte lors d'un concours tout aussi idiot.
Diavolo voyait presque des étoiles s'illuminer dans les yeux de la jeune fille quand elle lui prit la manche ; il voulut faire un geste de recul, par peur de la blesser, mais il contrôlait complètement son pouvoir, désormais, et lui seul pouvait décider quand activer les ténèbres, et quand les laisser à l'intérieur de lui. Aucun danger pour ses proches, du moment que son niveau de nervosité demeurait stable. Problème de gestion du pouvoir qui ne regardait que lui, mais qui pouvait embêter pas mal de monde...à la réflexion, correction, ça pouvait embêter toute la ville. Il n'avait jamais essayé d'aspirer les choses jusqu'à se sentir complètement "rempli" d'objets divers, car il supposait que les ténèbres n'avaient aucune limite. Il y a des choses qui doivent rester bien cachées, simplement.

Kei découvrit sa lame à son tour. Comme il l'avait plus ou moins bien deviné, elle savait se battre, avec une arme qui avait moyennement redoutable. Moyennement à première vue, car de ce qu'elle en disait, cette lame n'avait rien à voir avec celles qu'il avait pu croiser sur le Shinsekaï. Même un Kitetsu restait silencieux - il le savait pour avoir croisé le deuxième sur un navire amiral. Là, il était...conscient...okay, c'était une nouvelle un peu ahurissante pour Diavolo, mais il prit sur lui pour ne pas paraître un peu sceptique face à cette affirmation. La jeune fille pouvait mentir pour se protéger, ou pour se donner un genre, après tout. Mais c'était peu probable qu'un sabre puisse parler de lui-même. Enfin, elle était peut-être schizo ou quelque chose de similaire, le genre de fille à entendre des voix venues d'ailleurs, des voix amicales, et elle se met ensuite à se taper le bide en criant "regarde-moi papa ! regarde ce que je fais à ta fille !". Il avait connu un mousse comme ça, qui ne dormait pas la nuit, qui allait boire en cachette dans un tonneau du fond de cale, et qui revenait pour faire un spectacle à la fois pathétique et fort amusant, où les réveillés prenaient les paris : est-ce lui ou son double qui gagnera le match ? Généralement, c'était le double, mais lui-même avait de la ressource.
Qilin. Le nom l'avait fait tressaillir, comme s'il retrouvait un camarade de hamac sur son navire.

- Qilin... J'ai connu un Qilin, un vice-amiral de la Marine, pressenti pour passer amiral d'ici peu. Fruit de la Foudre...amusant, amusant. On vient de différents endroits, et pourtant, nous avons des similitudes. Par contre tu as dit qu'il était ton...zanpakato ? Ça ressemble à un nom de poisson légendaire qu'on servirait à des dieux. Avec un peu de sauce soja, bien sûr.

Il regarda attentivement la lame froide et silencieuse, quand d'autres questions lui venaient à la bouche. Il n'eut pas le temps de les prononcer à voix haute pour satisfaire sa curiosité envers la fille pour le moins originale, qu'une voix le fit sursauter et le sortit de sa contemplation. Bon sang, encore des emmerdeurs ! Mais que quelqu'un éradique la population de cette ville ! OH ! Ça, ça ! Ça c'était une idée ! Un génocide de tous les gêneurs, pervers, curés, marchands, vieilles peaux, mauvais payeurs, marins bagarreurs, pêcheurs méfiants et putes mal lavées ! De quoi retrouver un air pur, quand on se promenait du côté de toutes les rues enfin vidées d'habitants insupportablement présents à tous les points de son existence ! Certes, mais il faudrait devenir un sale pirate, un tueur de civils, le méchant de l'histoire, et s'occuper aussi des gamins qui braillent...Diavolo mit son idée dans les ténèbres, et se jura d'y penser avec un plan plus sérieux...

Pour l'heure, il est encerclé en compagnie de Kei qui n'aimera sûrement pas passer par la geôle et les tests psychologiques. Dans son état, ils l'interneraient vite fait bien fait. Il prit sur lui, se leva et commença à hurler, une pointe de couteau sortant de sa manche menaçant le cou de la jeune fille devant lui. Il lui fit un clin d'oeil, manière de lui dire que tout allait bien, qu'il avait un plan, et, le plus important, qu'il fallait le croire.

- N'approchez pas ! Ou je tue la gamine ! Faites pas les cons, vous voudriez pas avoir sa mort sur la conscience ! J'suis sérieux, moi ! J'suis au bout, j'm'en fous de faire ça ! RECULEZ !

Désolé pour les postillons, Kei. Fallait sortir avec un parapluie, surtout quand on ne connaissait pas le monde qui nous piégeait. Il avait activé son pouvoir simplement sur la main sortant le couteau, se préparant à la suite. S'ils persistaient, il n'aurait plus le choix que de montrer une autre facette de son pouvoir à la face du monde...la ruelle pour commencer. Admettant assez lucidement que son piège ne tarderait qu'un temps, il activa les flammes noires sur le reste de son corps. Sortez les guitares les filles, papa Tejada pète un câble. Faites hurler les baffles.

Subterfuges.

Le fruit de la Foudre, vraiment ? C'est très étonnant comme similitude : dans le monde des humains de chez nous, Kirin est un monstre mythologique souvent associé à cet élément. Serait-ce possible que nos mondes aient des bases, ou un passé communs ? Soit c'est ça, soit quelqu'un ou quelque chose a réussi à passer d'un monde à l'autre.. Ou tout simplement le hasard. J'aurai bien lancé le sujet sur le tapis mais l'arrivée des gardes est vraiment inopportune. Je n'arrive cependant pas à retenir un grand rire quant à la comparaison Qilin-poisson et d'en taquiner ma lame.

L'imagination du pirate est débordante ! Est-ce inné ou par habitude ? Va savoir, en tout cas, je n'aurai jamais eu la moitié de ses idées. Comme me prendre en otage, situation qui m'amuse assez alors que je montre un air des plus terrifiés histoire de paraître plus crédible aux yeux des autorités locales. Ils se braquent, hésitent, ce qui est une bonne chose. Chambouler leur logique est une bonne chose, ils en sortent moins efficaces. Quelle bande d'idiots.. Un simple brin de malice et ils auraient compris le subterfuge. Mais non. Bon, je ne vais pas m'en plaindre : leur idiotie nous avantage.

Les secondes ont l'air de durer des heures entières et je crois bien entendre les cerveaux des gardes marcher à plein régime. C'est clair qu'à leur place, j'y aurai réfléchi aussi à deux fois. A mesure que des flammes noires recouvrent le corps de Roucky-Diavolo, la peau des autre blanchit à vue d'oeil. Pas habitués à voir des choses comme celle-ci visiblement. Bon, moi non plus en fait.
J'hésite presque à le laisse s'énerver sérieusement et commettre un massacre, juste pour en voir plus sur son pouvoir. Mais Qilin me rappelle à l'ordre : les Shinigamis protègent les humains, ils ne participent pas à leur massacre. Une grosse différence entre lui et moi : il est beaucoup plus adulte. Roh, dommage, ça aurait pu être tellement intéressant et drôle !

Je me retourne vers le gardes, qui se sont déjà rassemblés pour attaquer. Au moins, ils ont décidé de faire quelque chose d'autre que de rester plantés sur place. Ils arrivent des deux côtés. Je penche la tête vers le haut histoire d'évaluer la hauteur des bâtiments, puis retourne ma tête pour détailler Pirate-Roucky : ça m'étonnerait beaucoup qu'il arrive à suivre si on devait grimper. Non que je sous-estime ses capacités physiques, loin de là. Me faire la malle avec un petit Shunpo.. Non.
Oh, j'ai trouvé ! Je souris comme une gamine, dévoilant toutes mes dents et sautillant entre Diavolo est les soldats.

- Tiens ! Laisse moi te montrer un petit truc que j'aime bien ! Ca s'appelle du Kidô, c'est un peu comme de la magie, et c'est simplement génial comme truc... Bon alors..

Je réfléchis un petit instant, puis envois mon attaque non sur les ennemis mais plutôt vers le sol.

- Bakudô, la 21ème technique d'immobilisation: Sekienton !

Un énorme nuage rougeâtre explose comme une bombe d'à partir de presque sous mes pieds et se disperse rapidement des deux côtés de la ruelle. Voilà, au moins c'est du tout en un, tous les soldats sont aveuglés. D'un pas rapide, je me rapproche du pirate et lui attrape la manche de la même manière que précédemment, lui disant de me suivre et priant intérieurement pour qu'il ne me mange pas avec ses flammes bizarres. Allez hop, on se barre vite fait bien fait ! Débordement évité ?

Kei jouait le jeu...par jeu plutôt qu'autre chose, semblait-il. Soit, du moment que leur couverture était tenue, elle pouvait bien faire ce qu'elle voulait. Ne pas surjouer, surtout ne pas en rajouter, les gens pouvaient parfois se montrer de parfois idiots, mais toujours un cran en-dessous de ce qu'on croyait. N'empêche que ça marchait sur les gardes...rien ne l'étonnait plus de la part de cette ville qui semblait avoir des yeux partout, et une peur viscérale du tout évènement sortant de leurs habitudes.

Cependant, la peau de Diavolo, pendant ce temps, se couvrait de noir à vue d'oeil, et il devint bientôt complètement recouvert de flammes noires. Il murmura plus pour lui-même, afin de se concentrer, de visualiser l'entier contrôle de chaque flamme.

- Yami Ningen...

Maintenant, qu'allait-il faire ? Une absorption totale du quartier, on relâche tout ce beau monde en l'air, et advienne que pourra. Les meilleurs et les plus forts survivront, et chacun pourra se sentir sur une île déserte en solitaire, et se retrouver en face de ses propres angoisses existentielles, rabaissées à l'ordre du manger/dormir. Non, Kei était à côté de lui, trop dangereux, trop ambitieux. Ce qu'il savait faire relèverait de la destruction pure et simple, or il fallait toujours rester discret, pour vivre heureux vivons caché. Certes, un feu n'était pas le meilleur moyen de rester discret, mais les poissons en valaient la peine ! Sans morts d'homme si possible....alors que faire ?

Il voyait que Kei cherchait aussi une solution rapide, la fuite peut-être, même. Elle se tourna vers lui et annonçait qu'elle tenait quelque chose. Vas-y, petite, t'as été la plus rapide pour trouver l'idée salvatrice, je te laisse faire. Un kinder pour les effrayer ? Vouais faut voir, drôle de pouvoir avec un sabre qui parle (penser à l'interroger plus longuement sur ce sujet...).

La suite fut rapide. Technique de dispersion, comprit Diavolo. Bien pensé, trop protecteur pour lui, mais bien pensé. Tout le monde allait plus ou moins bien s'en tirer, du coup. Pas plus mal. Mais il resterait des témoins, des gêneurs, de la soldatesque connaissant leurs visages. A rajouter sur la liste des emmerdeurs potentiels et visiblement présents à chaque coin de rue de cette ville totalitaire et obsédée par les sans-abris. Il plissa les yeux pour se repérer et sentit la main de la fille sur sa manche, la vit malgré la fumée rouge et l'entendit parler de fuite. Comme elle, il n'avait vu qu'un seul chemin, celui des toits. Seul hic : il devrait montrer une autre facette de son pouvoir, et il en avait dans la situation présente rien à faire.

Sans demander l'avis de Kei, il passa un bras sous ses jambes, la prit au niveau du dos de l'autre bras, la fit basculer très rapidement de manière à la tenir et commencer à activer la gravité.

- Inryoku !

Ses pieds décollèrent du sol et il se mit à léviter rapidement vers le haut, tenant la jeune fille. En quelques secondes, ils furent sur le toit de l'immeuble voisin. Il déposa Kei et se dirigea vers le bord du toit, regardant les soldats touchés par son sort. Il contrôla la gravité, la fit augmenter pour les faire revenir au sol, presque sans encombres à un mètre du sol, de manière à les déséquilibrer. Au loin, il vit les cavaliers qui le pourchassaient tout à l'heure arriver avec un groupe, derrière eux, facilement reconnaissables à ses robes rouges annonçant l'heure de la confession. Manifestement, ils avaient attiré du monde, beaucoup de monde, et il s'agissait maintenant de trouver la bonne idée du jour pour semer - une nouvelle fois - les poursuivants infatigables.

- Y'a du monde en bas...je pourrais m'en occuper, je suppose que toi aussi...mais si tu as un autre plan, un truc brillant en trois parties, synthétique et clair, je suis preneur.

Au pire on dit que c'était pas nous, qu'on était sous contrôle hypnotique d'un sorcier trop puissant pour quiconque, qu'on a eu une enfance difficile et que les pouvoirs publics n'ont jamais rien fait pour nous. C'était ça ou les ténèbres sur ce quartier, et Diavolo n'était pas sans vouloir rendre coup pour coup.

Désaccord.

Mais, qu'est-ce que.. ?! Le temps de réaliser ce qui passait, nous voilà en train de.. voler ? Visiblement, ça vient de Roucky-Diavolo, ce doit être l'un des capacités liées à ce fameux Fruit, comme il l'a dit plus tôt. Et puis c'est quoi ce comportement de macho à me trimbaler de la sorte ? C'est pas possible.. je grogne en reposant les pieds au sol et me laisse le temps de me calmer.

Bon, au moins, sa manière de faire est restée au maximum pacifique, ce dont je l'en remercie intérieurement. Enfin, pacifique.. Je m'approche aussi du bord du toit et observe cette scène assez inhabituelle. Les soldats aussi ont été 'soulevés' par la technique du pirate. La-dite doit donc concerner une zone, et non des personnes ciblées, ou bien ? En tout cas, les pouvoirs de ce type sont bien plus qu'intéressants !

Qilin me souffle qu'ils doivent être malsains, et qu'il faudrait l'arrêter avant qu'il ne cause trop de dégâts. Chose qui va à l'encontre de sa règle numéro 1, à savoir protéger les humains. Mais doit-on encore le considérer comme un humain après qu'il ait acquit toutes ces capacités ? Il pourrait devenir une menace, comme les Quincy.. Je stoppe court au baratin tacite de ma lame. Il n'a pas prononcé ces mots mais je les ai clairement ressentis. Non, c'est non.
Un zanpakuto et son propriétaire sont sensés s'entendre mieux que personne, ce n'est pas le cas pour nous deux. Bien sûr, il me connaît presque mieux que moi-même, mais il arrive des fois comme celle-ci où nos avis s'opposent du tout au tout. Il est bien plus méfiant que moi, certes, mais je ne serai pas sa marionnette. Je le rattache plus fermement à ma ceinture en le priant de se la fermer le temps que notre situation se calme.

J'observe le dos du pirate tandis qu'il fait redescendre les soldats au sol. Un dos large, qui se voudrait presque protecteur et rassurant. Mais il est clair que cet homme manque de stabilité. Comme moi d'ailleurs. Et j'imagine que les normes doivent changer d'un monde à l'autre alors bon.

Et voilà la cavalerie qui se ramène. On est pas sortis de l'auberge.. Reste à savoir quoi faire. Les combattre pour de faux, dans le genre les laisser K.O. ? Nous risquerions fort de faire des morts, et ceci est inacceptable. Raah, quel bordel. Je me mordille la lèvre inférieure, tentant en vain de chercher un Kido qui pourrait nous sortir de là, mais même de ce côté, je sèche. Le Kido est un art très utile face à un nombre réduit d’adversaires, l'effet touche une zone plutôt précise et malheureusement trop petite dans le cas actuel. Raaaah.. ! Je crois bien commencer à comprendre pourquoi Diavolo a pris la fuite comme un dératé lors de nos deux premières 'entre-vues'. Me tournant et me retournant sur place, j'observe les toits. Désignant un bâtiment un peu plus loin, je réponds à toute allure.

- Le temps qu'ils montent, on peut prendre le large et sautant à travers les toits. Les ruelles sont assez étroites, on peut facilement atteindre le bâtiment la-bas au bout. Après.. seuls les cavaliers seront encore à nos trousse, les autres seront trop occupés à monter et redescendre les escaliers. Et pour les cavaliers.. Il faudra aviser ! Je ne connais pas le coin autant que toi.

La demoiselle grognait ? Le petit voyage sur Diavolo Airlines ne fut pas plaisant, apparemment. Il ne connaissait en rien ses capacités, mais il était presque certain qu'elle ne pouvait voler, alors il avait pris le moyen le plus sûr et le plus rapide. Passons à autre chose, à savoir la suite, des hommes en armes, des problèmes divers à gérer, et une question que se pose un sans domicile assez souvent : où aller ?

Pour l'instant, semer la soldatesque. Cette ville totalitaire allait grouiller de soldats, et ils n'auraient bientôt plus d'endroits où bouger. Il était temps de faire mouvement...il se tourna vers Kei, un peu sceptique, un brin gêné.

- Je peux aller assez vite en lévitant, mais si tu n'apprécies pas le voyage, tu peux te déplacer à ta guise. Seras-tu assez rapide ?

Il décolla à quelques mètres du sol, les yeux fermés, les poings serrés pour ne pas toucher sa camarade avec la gravité. La tenir autour de sa personne demandait plus d'efforts, un contrôle plus difficile. Les ténèbres étaient un pouvoir de zone, une libération de puissance qui ne se souciait pas des personnes à proximité. Un pouvoir de solitaire pur, en somme. Dès qu'il y avait quelqu'un, des proches à côté, par contre, il fallait se restreindre, limiter le champ de puissance, en continu. Ses camarades marins l'avaient appris en coulant littéralement dans les flammes noires, alors que Diavolo ne tenait absolument pas son pouvoir. Dans la situation présente, il réussit à former une sphère toute autour de lui, allant et venant sans cesse de son corps, jusqu'à vingt centimètres autour de lui.

- Si tu ne veux pas mon aide, ne m'approche pas à moins d'un mètre. Simple prudence.

Il zieuta le bâtiment qu'elle avait indiqué, l'air soucieux. Et après ? Les cavaliers pourraient suivre, il y aurait peut-être à se battre, mais la suite de ça...se planquer, se déguiser, sortir de la ville...partir ? Rien ne les attachait à cette ville insupportable, après tout.

- Pendant ce temps, on pourrait réfléchir sur la suite des évènements. Nous venons tous deux d'autres mondes, nous n'avons aucune attache. On pourrait aller ailleurs - enfin si ma compagnie n'est pas trop dérangeante pour toi...je propose qu'on se planque, qu'on file vers le port, et qu'on cherche un moyen pour s'enfuir de ce patelin moisi...En attendant...

Il fit volte face, saute du toit et commença à voler vers les toits voisins, surveillant l'avancée des cavaliers, si Kei le suivait correctement, et contrôlant sa sphère de gravité tandis que les flammes noires flambaient joyeusement sur son corps. Okay, la situation était merdique, mais comme dans une tempête en mer, suffit de serrer les dents et ne pas perdre l'horizon de vue. Un objectif, de la ténacité, et ce qu'il faut de bonne entente. On verra pour les palmiers et les cocktails plus tard. Tout cela lui donnait des envies de chansons, mais le moment n'était pas le mieux choisi pour ça. Comme on disait chez les pirates : à l'abordage yohohohohoho !

Echappatoire.

La plupart des gens stressent de plus en plus à mesure de se faire prendre au piège. C'est mon cas aussi, jusqu'à un certain point : soit on explose, soit on relativise. Dans ce cas précis, je relativise. Ce ne sont que des humains après tout, et quel Shinigami a peur des humains, p*tain ?! Une bonne claque mentale et hop c'est reparti. Si ces morceaux de chair s'opposent au chemin que je veux prendre, je le ferai déguerpir. Qilin me souffle d'y aller mollo mais je sens très bien que lui aussi commence à ne plus supporter cette chasse aux sorcières. C'est tellement plus simple dans Notre monde des humains où nous sommes invisibles ! Ici, j'ai l'impression de me trimbaler avec une de ces fameuses poupées comme corps, j'espère juste que mes capacités n'en sont pas réduites.

Serai-je assez rapide ? Je m'esclaffe, presque avec dédain. S'il existe une technique que je chérie au plus haut point, en dehors de celles de Qilin bien sûr, c'est le Shunpo. Je le laisse s'envelopper de flammes noires à sa guise en constatant qu'il a plus de mal qu'avant, enfin, qu'il se concentre plus. Sa technique est donc malléable. Ce gars est décidément stupéfiant.
J'attends qu'il prenne son envol pour m'élancer à sa suite. Ses flammes sont rapides, mais je le rattrape, avec un sourire en coin, nargueur.

- Se planquer ? Ca reportera juste le problème et les autres auront le temps de s'organiser. Je pense qu'on devrait filer de suite.. Le port, un échappatoire ? Je ne sais pas.. Tu veux 'emprunter' un bateau j'imagine ?

Si c'est la cas, je dois dire que l'idée me laisse pantoise. Je ne me souviens pas avoir mis les pieds un jour sur un bateau, et je dois avouer ne pas en avoir très envie. Ces embarcations représentent plus une prison, un cul de sac, qu'un moyen de s'échapper. Arf. Bon, après tout, Roucky-Diavolo est un pirate, il doit savoir ce qu'il fait. Espérons. Comprenant mes choix, Qilin vibre comme un malade pour me prouver son désaccord. Je soupire. Roucky-Diavolo est dangereux, certes, mais je pourrai lui fausse compagnie rapidement s'il tente de m'attaquer. D'ailleurs, je n'aurai même pas besoin de fuir, je pourrai le combattre. Mais sur un bateau, c'est clair que c'est différent.. Qilin, Qilin.. Si tu le mets dans le même sac que les Quincy, autant le surveiller de près non ? Il se calme. Pff, quel idiot borné : tu rêves.

- Bon, va pour le port.

Je tourne la tête de tous les côtés. C'est où le port déjà ? Saleté de sens de l'orientation. Concentrée par les sauts entre les bâtiments, je ne comprends pas trop ce qu'il se passe quand je sens une goutte tomber sur ma joue. De l'eau ? Relevant la tête, je remercie littéralement le ciel pour cette abondance de super nuages bien gros et bien foncés qui nous surplombent. Je ne prends pas la peine de répondre au fait de continuer un bout de trajet ensemble : si je suis toujours là, c'est que c'est bon.

- Ok, j'ai un moyen de prendre de l'avance par rapport aux cavaliers, mais il faudrait que nous redescendions pas trop loin du port, pas envie de me perdre hum. Tu pars devant faire je sais pas quoi et je te rejoins dans les quelques secondes pour t'aider. Normalement on aura pas trop de soucis à se faire, du moins si le port n'est pas envahi de soldats..

Bon alors c'est par où le port ?

Rapide la Kei. Elle ne manquait pas de ressource, ce qui allait faciliter la suite des évènements, qui arrivait en même temps qu'un gros orage, à en juger le rassemblement menaçant au fond du ciel. Prendre la mer par un temps pareil, ça pouvait relever du danger voire de la folie furieuse, mais l'envie de quitter cette ville était plus forte que tout.
Aller au port était une bonne idée. Emprunter un bateau aussi, si on occultait les marins qui vivaient peut-être dessus. Un navire marchand était une possibilité, ou alors il restait l'engagement dans une équipe de marins, prêt à partir à la prochaine marée. Mais de là à accepter une fille novice, assez louche, ainsi qu'un soi-disant capitaine en costard...l'emprunt pouvait se défendre si on agissait rapidement.

- Emprunter un bateau, ou obtenir une place à bord d'un navire contre quelques pièces libérées au capitaine. A deux, les manoeuvres vont être impossibles, à moins de prendre une barque ! Et je ne prendrai pas une barque avec ce temps, sans provisions ni équipements !

Ils avaient éventuellement une chance. Un bateau qui part d'un port, encore pas loin de la jetée, assez volumineux pour qu'ils se fondent pendant un temps parmi l'équipage. Jusqu'à improviser. Ou subir divers complications nécessitant une intervention musclée et éventuellement sanguinaire. Diavolo remua l'idée, prit de l'altitude et repéra au port un navire qui commençait à déplier les voiles et larguer les amarres. On y chargeait les derniers tonneaux d'eau et d'alcools, sans doute - impossible à discerner de loin. Le navire allait bientôt partir vers le large, où des éclaircies lui permettraient de se sauver d'un départ chaotique. Le coup était à tenter. Il descendit à la hauteur de Kei alors qu'elle se décidait pour le port.

- Y'a un bateau qui part du port d'ici peu. Si tu cherches exactement l'endroit, regarde à ta droite, à 700 mètres : tu arrives sur les premiers mâts, et encore plus à droite tu as un gros navire qui déplie ses voiles. Trois mâts, assez volumineux pour accueillir une cinquantaine de personnes.

Kei semblait avoir un autre plan en tête. Il acquiesça à sa demande, sans poser plus de questions. Ni l'envie ni le temps ; du moment qu'elle suivrait son chemin et qu'elle montait en temps voulu, rien à dire.

- Okay. Je trace sur le bateau pour voir si on peut s'incruster. Fais vite.

Il continua à léviter au-dessus des toits, zieutant le port pour observer les mouvements de foule et ceux des soldats. Les cavaliers étaient maintenant bien loin derrière lui, et il comptait une dizaine de soldats parsemés sur le port à surveiller les bars et les étalages de poissons frais qui arrivaient directement des cales des bateaux de pêche. Le bateau qu'il avait en vue avait encore cinq tonneaux en route sur la passerelle entre le quai et le pont supérieur. Il fonça dans une ruelle tranquille juste avant le port, atterri sans encombres et traça vers le bateau. Juste devant, un homme en gilet, portant un chapeau, regardait la cargaison tout en discutant avec un autre homme qui engueulait quelques dockers au sujet d'un retard sur la marée. Armateur et capitaine, visiblement ? Il se dirigea vers eux, commençant à fomenter des excuses diverses pour monter à bord du navire commercial.

Retardataire.

Encore une fois, je ne comprends pas. Les bateaux, c'est pas comme des voitures navales pour les humains, il faut être beaucoup pour le faire avancer ? Pas de commandes, pas de boutons ? Arf, je laisse tomber, c'est vraiment trop bizarre ici ! Je prends note des informations sur le-dit bateau. Grand trois-mats, ok. Cinquante personnes ?! Va falloir se faire discrets alors. Si je me souviens bien, dans le monde des humains que je connais, il existe une superstition sur les femmes à bord. Hm.. Je garderai ma capuche et la tête baissée au maximum alors, déjà que je ne passe pas inaperçue avec ma tignasse blanc neige. Bon, après, avec ma silhouette, ça ne servira pas à grand chose, à moins que je me bande la poitrine, et même. Et puis j'ai pas le temps hein.

Tandis que le pirate se dirige vers le port, je m'arrête et redescends sur la terre ferme. Habituée à sauter sur de grandes hauteur, je n'ai même pas réfléchi au fait de posséder ce corps si 'solide'. Je peux donc assurer ma douleur en touchant le sol, et les injures qui vont avec. Les cavaliers vont débarquer d'ici quelques secondes, je me relève avec quelques difficultés. S'ils sont si rapide, c'est tout simplement grâce à leur chevaux. Et ces animaux s'effraient rapidement, presque pour un rien. Je vais donc leur foutre la peur de leur vie.

- Toi là, ne bouge plus !

Ah, les voilà. Souriant aux cavaliers en train de débouler dans la rue vide, j'empoigne Qilin et murmure à l'arme de gronder. Ca m'étonne presque de voir qu'il m'écoute, parce qu'avec ce qu'il s'est passé il y a quelques minutes seulement, je pensais déjà devoir trouver une autre solution. La taille de la lame augmente d'un bon mètre et se recouvre de petites étincelles. Reportant mes yeux, scintillants eux aussi, sur les cavaliers, je compte leur nombre. Bien, ils sont tous là. Etonnés et regroupés, parfait. M'adressant à Qilin, je lui précise qu'on ne va pas faire comme d'habitude, à savoir tuer au plus vite. De toute manière, il ne m'aurai jamais laissé faire ça.
Me postant au milieu de l'allée, je prends l'arme des deux mains et la pointe en direction des cavaliers.

- C'est parti. Désolée messieurs ! Raijin Hou no Ikazura !

Un craquement puis une détonation retentit du milieu des nuages et un éclair descend tout droit pour s'écraser, non sur les cavaliers, mais juste devant eux, laissant une sympathique trace plus foncée sur le sol. Cette technique est normalement faite pour brûler littéralement l'ennemi, mais elle consiste en un simple contrôle de la foudre alors le point de contact est variable. L'effet voulu se produit : hennissements des chevaux, hurlements des humains qui tombent de leur monture affolée. Martèlement de sabots sur le sol, des animaux qui s'enfuient à toute allure. Au moins, ceux qui sont tombés ne seront pas capables de me rattraper jusqu'au port. Seuls les plus avisés ont réussi à maîtriser leur canasson, mais sont aveuglés à cause de l'éclair. J'enchaîne donc avec une technique simple et efficace de Hado : la première, Shô, la Poussée. Je pointe mon index au niveau des articulations des pattes des chevaux restants et lance mon sort. Ils ne sont pas projetés très loin. En fait, ils perdent juste l'équilibre et tombent ridiculement au sol. Je réitère ce petit sort sur les soldats qui restent, plus pour jouer que par nécessité.

Contente de mon boulot, je leur fais un signe d'adieu et déguerpis vite fait bien fait en direction du port tout en scellant Qilin. Aucune victime et une constatation : je n'ai pas perdu en puissance, ni en précision en arrivant ici. Bon, c'est par où le port maintenant ? A droite et à gauche. Shunpo. Je continue jusqu'au bout. Merde, c'est pas là. Demi-tour, je reprends à droite. Ah, voilà le trois-mats ! Je remonte ma capuche à mesure d'avancer..Après tout, il commence à pleuvoir, ce qui aide à la discrétion, non ?

Sur le quai Diavolo avait abordé les deux hommes. D'abord méfiants, craignant visiblement un individu en uniforme, ils l'écoutaient avec une certaine attention. L'armateur l'écoutait en souriant et en rebondissant sur ce qu'il disait, les défis du commerce maritime, la difficulté que de réunir un équipage solide et de faire fortune sur l'océan déchaîné. Pendant ce temps, le capitaine commandait les dernières manoeuvres, et surveillait le nouveau venu du coin de l'oeil, attendant qu'il délivre la véritable raison de sa venue.
Diavolo quant à lui s'amusait comme un petit fou à raconter ses anecdotes au sein de la marine, et son récit de naufragé par anecdotes choisies précisément pour leur côté burlesque. Puis, quand la pluie fit franchement son apparition, il devina que les deux n'allaient pas se faire rincer pour ses talents de conteur, surtout qu'il accaparait déjà leurs sujets de discussion d'avant départ.

- Tout cela m'a rendu nostalgique, et je reprendrais bien la mer, là, dans l'instant. Votre capitaine doit ressentir ça aussi, l'appel de la houle, le chant du sel ! Ah, quel plaisir de naviguer en compagnie des meilleurs marins !

- Il est vrai que M. Hawkins et son équipage comptent parmi les meilleurs.

- S'il vous restait une petite place ou deux pour moi et un camarade, vous ne refuseriez pas deux braves loups de mer à leur patrie d'origine, Monsieur, n'est-ce pas ?

- Si ces loups de mer savent travailler sur un navire, ma foi, il doit rester quatre ou cinq places qu'on garde éventuellement pour des amis dans les escales. Vous savez comment c'est...

Diavolo marqua un sourire prononcé, mais avait peur de comprendre ce que disait l'armateur. Quatre ou cinq places vides sur un bâtiment, c'était soit pour accueillir des amis pas forcément annoncés au programme, soit pour accueillir des filles dans les ports, les payer pour qu'elles restent à faire le ménage. Un vieux soldat en avait parlé une fois, dans un bar...sur son bâtiment, on laissait toujours quelques places pour les putes des ports, qui passaient l'escale dans leur hamac, en compagnie de tout l'équipage successivement. Cela étant, il y avait peut-être un coup à jouer là-dessus. Un coup dangereux, mais après tout, il commençait à fomenter divers plans de mutinerie en regardant le capitaine, le dénommé Hawkins. Une tête de brigand à connaître la mer par coeur. Un repenti, sans nul doute, qui sait repérer les individus louches. Diavolo allait lui en donner, tout en charmant l'armateur. Au final, c'était ce dernier qui décidait.

- J'ai passé, comme je vous l'ai dit, ma vie sur la mer. Je sais tout faire sur un navire, avec une spécialité au tir de canon. Je peux défendre votre navire en toutes occasions. Avec moi, votre cargaison ne court aucun risque. Puis le capitaine Hawkins me verra à l'oeuvre et jugera correctement de l'endroit où me placer, j'en suis sûr.

L'armateur retint un mouvement de soulagement. Il était rassuré. De quoi ? D'abord l'uniforme l'avait rendu méfiant, puis une protection le soulageait...Quelque chose était franchement louche, et Diavolo ne parlait pas du regard mirifique du dénommé Hawkins, qui avait dû prendre un trop fort coup de vent un jour. Il savait qu'il y avait un souci quelque part, mais il fallait partir, et vite, sans trop vouloir en savoir plus sur les problèmes de l'armateur.
Par ailleurs, il vit la parka verte significative de Kei avancer vers le navire, ce qui le poussa à accélérer les choses, surtout que le capitaine commençait à motiver son équipage pour partir rapidement.

- Oui, partez au plus vite. J'ai entendu dire qu'il y avait du grabuge en ville. Ces hors-la-loi sont vraiment des nuisibles insupportables. Il faudrait que les autorités les chassent une bonne fois pour toutes, et qu'on les exécute en place publique, pour montrer qu'on est chez nous, ici !

- Vous avez tout à fait raison, sieur. La sécurité est primordiale, et c'est qu'on se sent envahi ! On n'est plus chez nous ! Tenez, je vous parlais de mon camarade, que voilà justement pour embarquer. Venez un peu par ici, par ailleurs.

Il prit l'armateur par le bras et l'emmena un peu plus loin, surveillant toujours du coin de l'oeil l'avancée de Kei. Devant l'air de surprise de l'armateur, il lui fit un signe de la main pour que ce dernier s'approche, oreille contre bouche, afin de lui révéler un secret qui resterait entre eux. La pluie leur était favorable, les marins et le capitaine auraient une vision différente, croyant à une discussion rapprochée, mais aucune messe basse.

- Je voyage avec une grande diva. Une chanteuse de talent qui donne dans le chant de marins. Je m'occupe de sa sécurité, je la ramène chez elle. Si la traversée se passe sans encombres, vous aurez un de ses mille coffres qu'elle possède à son manoir une fois l'escale de sa ville effectuée. Elle collectionne les pierres précieuses, vous savez...Il faut qu'elle soit là incognito, évidemment. Bien sûr, vous direz à votre capitaine que nous sommes de grandes personnalités de ce monde, et qu'il faut notre propre cabine. Dans le même temps, je surveille votre cargaison, faites-moi confiance.

Grand sourire et figure innocente. On lui donnerait à surveiller des vierges, si on en jugeait par son visage. L'armateur esquissa un geste de surprise, puis devant les clins d'oeil, le manoir de la diva et les pierres précieuses, il se mit à glousser, à devenir rouge et à trépigner intérieurement en pensant sans doute à sa réputation et aux richesses qu'il pourrait accumuler. Il serra la main de son interlocuteur en souriant malicieusement, un peu trop selon le pirate, et alla donner ses commandements à son capitaine, assurant la place des deux nouveaux sur le navire. Diavolo réfléchit en le voyant partir. Le type avait accepté trop rapidement l'affaire, puis il avait fait miroiter la richesse d'un des passagers. Vu sa tête en partant, il se mit à réfléchir sur la probabilité d'un coup fourré, fortement possible une fois en mer. Kei pourrait se défendre, lui aussi...au final c'était peut-être le meilleur plan. Kei arriva et il l'invita à marcher jusqu'à la passerelle du navire, pour saluer l'armateur et le capitaine.

- Tu arrives à temps...j'ai négocié assez bizarrement notre entrée sur ce bateau. Il fera plusieurs escales dans les grandes villes, pour faire du commerce. Jusqu'à nouvel ordre, tu es une diva, une chanteuse riche à millions, et je suis ton garde du corps ; tu voyages incognito et tu ne parles à personne. On a une cabine personnelle, et non pas des hamacs avec le reste de l'équipage. J'ai promis une belle récompense quand on arrivera, mais je doute qu'on arrive sans encombres. Ça m'a l'air d'être une belle bande de voleurs, voire de truands, j'irai zieuter la cargaison une de ces nuits pour en avoir le coeur net. Bon, tu les salues en restant planquée, et on fonce dans nos quartiers.

Départ.

Moi, un diva riche à millions ? J'aimerai bien oui.. Ne parler à personne, aucun problème ! De toute manière, il m'aurait été impossible de prendre la place d'un matelot : je n'ai aucune idée de ce qu'il faut faire. Tout paraît parfait, jusqu'à ce qu'il m'annonce penser que l'équipage n'est pas des plus honnêtes. D'un coup, j'ai moins envie de m'avancer sur la passerelle. L'idée d'être perdue en pleine mer avec une bande de loubards est loin d'être réjouissante. Mais nous n'avons pas le choix, les soldats ne vont pas tarder à arriver au niveau du port.

L'armateur et le capitaine nous attendent en haut de la passerelle, l'un des deux est tout sourire. Arrivés à leur niveau, je relève la tête mais ne baisse pas ma capuche. Discrétion oblige. Et puis quelle diva irait dévoiler sa chevelure sous la pluie ? S'en suivent quelques secondes de silence pendant lesquelles je détaille les deux hommes. A première vue, rien à dire. L'un des deux s'avance pour prendre la parole, celui qui a l'air visiblement très heureux.

- Bienvenue à bord, Madame. Je suis l'armateur de ce navire, et voici le capitaine Hawkins.

Il se décale de quelques centimètres pour laisser le capitaine se présenter. Présentation des plus courtes, un simple signe de tête, ce qui m'arrange assez.

- Madame.
- Laissez-moi vous remercier pour votre aide, messieurs, qui bien entendu, sera chaleureusement récompensée.

L'armateur trépigne comme un gamin à qui on vient de promettre un énorme cadeau. Le capitaine en revanche, ne paraît pas des plus ravi. Faudrait-il le caresser dans le sens du poil ? Après tout, un homme est vite désarmé lorsqu'un femme vante ses mérites. Allons bon.

- Et vous, Capitaine, votre navire est des plus plaisants. Je suis certaine que ce voyage sera.. un régal. Ma présence ne posera pas de problème je vous assure, je sais me faire très.. discrète, quand il le faut.

Sourire ravageur de ma part, et un éclair vicieux passe par les prunelles de l'homme, accompagné d'un sourire en coin. Raah, gros dégueulasse va ! Je crois bien que je vais passer tout le trajet cloîtrée dans la cabine, pas envie de croiser un vicieux comme ça tous les jours.
Avec un air un peu plus hautain, je tourne le dos aux deux marins pour faire face à Diavolo.

- Roucky, nos quartiers, veux-tu.

En fait, cette situation me fait bien rire. Je lui fais une grimace comme une enfant puis reprends un visage des plus sérieux en adressant un dernier salut aux deux autres.
Derrière nous, les derniers détails avant le départ se concluent : nous allons quitter le port. Je tourne une dernière fois la tête en direction de terre ferme. Est-ce une bonne chose de s'éloigner ainsi de mon point d'arrivée ? Quelle est la taille de ce monde ? Arriverai-je à revenir ici un jour s'il le faut ? Sentant une montée d'angoisse, je coupe court à mes pensées tout en entendant Qilin murmurer que nous n'avions pas le choix.
Ca fait toujours cet effet de partir sur un bateau ou quoi ?! Comme si c'était un point de non-retour. Arf. Bon, on s'en fou maintenant, c'est parti !

Les présentations furent courtes et concises. L'armateur serait bien resté sur le navire, s'il avait pu, en observant Kei. Fallait espérer que les marins ne seraient pas tous aussi excités que ce type, sans quoi la traversée risquerait d'être tumultueuse. La tête du capitaine aurait dû être encadrée pour décourager les jeunes filles de s'aventurer seule la nuit, quand elles sont prises d'envies de sorties nocturnes. Un type comme lui, tu le croises le soir, tu changes de trottoir. Le genre à faire la une des journaux, et pas pour un acte de gloire ou un premier prix de pêche à la truite. Enfin bon, puisque Diavolo était désormais le garde du corps de Madame, tout devrait normalement bien se passer. Surtout qu'elle cachait bien son jeu.

Avant de se diriger vers la cabine, Diavolo demanda où celle-ci se trouvait au capitaine qui lui indiqua les escaliers de droite, deuxième porte à droite. Le vieux demanda à son tour si la Diva chanterait pour le repas du capitaine ce soir. Diavolo répondit qu'il poserait la question à l'intéressée, et alla retrouver justement cette dernière pour lui indiquer le bon emplacement de sa cabine. Il lui montra la porte, tout en saluant un ou deux marins qui s'arrêtaient sur la présence féminine à leurs côtés, et la fit entrer.

La cabine pouvait contenir une personne facilement ; à deux, ça devenait difficile de ne pas se marcher sur les pieds. Un lit simple, une table de chevet avec des tiroirs ainsi qu'une commode, et juste assez de place pour circuler. Tout était cloué ou tenu par des planches, évidemment, de façon à ce que les meubles ne puissent bouger lorsque la mer est agitée. Un hublot officiait comme seul point de lumière, et il donnait une vue restreinte mais plaisante sur le port et les soldats qui arrivaient en trombe. Trop tard maintenant, la passerelle se relevait doucement, et l'embarquement était imminent.

Il se tourna vers Kei, la laissant profiter à loisir de son espace, qui serait pratiquement son seul lieu de vie pour une durée déterminée - du moins pour l'instant. Il regarda s'ils pouvaient vivre à deux dedans, puis jugea qu'une fille voudrait sûrement son intimité dans un lieu aussi étroit. Toute seule, la cabine serait spacieuse. Y'avait pas à jacter.

Il prit la poignée de la cabine, et fit les dernières recommandations avant de chercher un lieu plus propice pour lui.

- Installe-toi bien, en principe on ne viendra pas te déranger, sauf pour les repas. Le capitaine te réclame ce soir, sans doute pour te reluquer, mais aussi pour t'entendre. Des informations, des confirmations, et une belle voix... Si tu veux, j'ai un chant de marins qui peut faire mouche à coup sûr. Je reviens, je vais juste voir où je vais dormir. Le temps de trouver un hamac. Essaye de te faire à cet endroit, on y est pour un certain temps...

Un début en mer plutôt désagréable.

A première vue, le séjour ne sera pas si désagréable que ça ! Une petite pièce douillette et à manger, que vouloir de plus quand on a rien ? Pendant que Diavolo observe notre départ à travers le hublot, je m'assois sur le matelas, puis jette en arrière comme une masse. Pouaah.. Qu'est-ce que ça fait du bien d'être tranquille. C'est bien la première fois que je suis aussi détendue depuis mon arrivée, et pourtant, ça devrait être tout le contraire. Je relève la tête pour mieux entendre ce que le pirate me raconte, puis fronce les sourcils en l'écoutant.

- Ce vieux crado.. Il a pas traîné. En espérant qu'il ne demande pas de concert privé.. S'il le fait je le tue.

M'entendre chanter ? Bon ok. J'accumule pas mal de défauts, comme la maladresse et le mauvais sens de l'orientation, mais en contre-partie j'ai quelques points forts, comme le chant et le spectacle : une voix pas mal et pas de trac. Certes, assez inutile pour un Shinigami, mais on fait avec ce qu'on a.

- Oui, apprends moi ton chant, et aussi quelques autres si tu veux bien. Ca m'étonnerait que les chants de mon monde soient les mêmes qu'ici. Mais qu'est-ce que tu racontes ? Trouver un hamac ? Tu restes ici. Je te rappelle que tu es sensé être mon garde du corps.

Je me redresse et observe la petite chambre de long en large.

- Lorsque nous étions en fuite suite à l'attaque des Quincy, l'intimité n’existait plus, et nous nous réfugiions avec les autres Shinigamis dans des endroits encore plus exigus lorsqu'il le fallait. Certes, le lit est petit, mais de toute manière je serai enfermée dans la cabine le jour, donc je dormirai pendant que tu accompliras tes devoirs de marin.

Mes yeux se perdent dans le vide tandis que je repense aux événements datant de plus de trois siècles déjà. Je soupire puis secoue la tête comme s'ils allaient partir avec ce simple geste. Nous avons tous nos fantômes, dirons nous. Et je ne veux pas me faire happer par les miens.
L'espace paraît de plus en plus petit d'un seul coup. J'ai la tête qui tourne, et l'estomac de même. C'est quoi ce bordel ? La houle, c'est ça mon problème. Le temps vient de virer à l'orage, et l'avancée du bateau vers le large augmente l'intensité des secousses. Mon visage en devient carrément vert.

- C'est une blague ou quoi ? Me dis pas que ça va être comme ça tout le voyage.. J'vais vomir..

Misérablement pathétique. Un Shinigami qui a le mal de mer, non mais franchement. Doublement verte. D'instinct, je me roule en boule sur le lit en essayant de faire passer cette sensation si désagréable. Pitié, dites moi que ça ne va pas durer ! Je me retourne une dernière fois, et me retrouve sur le dos, le visage de plus en plus verdâtre. Malade.. Quelle horreur.. Malade..

- Au secours.. Aidez-moi..

Hé ben, déjà le mal de mer ! ça n'avait pas traîné, ils venaient à peine de quitter le port ! Diavolo se dépêcha pour trouver un récipient, n'importe quoi, et traça vers les cuisines pour prendre un pot en fer ou quelque chose y ressemblant. Il revint avec un seau servant à laver la vaisselle...il le laverait quand Kei sera remise de ses nausées marines. Il revint dans la chambre rapidement, réfléchissant à ce qu'il fallait faire dans un cas pareil. Elle lui avait demandé de lui apprendre des chants de marins, il faudrait qu'elle chante ce soir devant le capitaine, et il irait peut-être dormir ailleurs pour une nuit. Non pas que la compagnie de la jeune fille soit désagréable, mais il dormait mal aux côtés de relents de vomi. Même à côté d'une malade, la perspective l'enchantait peu. Il n'en dit rien à Kei, préférant s'occuper d'elle à fond avant de voir comment il allait lui se débrouiller avec une femme qui n'a pas le pied marin. Bien sûr, il avait quelques trucs pour faire passer ça.

- Bon...on a des remèdes de la vieille école pour faire passer ça. Tu vas me prendre par le bras et tu vas sortir avec moi sur le pont supérieur. Prends ta couverture, couvre-toi bien. Tu vas respirer un peu d'air pur et regarder au loin pendant une heure ou deux. Pendant ce temps, j'aiderai aux manoeuvres et je lancerai des chants de marins. Ça te va ?

Il craignait cependant que les marins ne soient un peu trop intéressés par elle, mais vu son état, il est probable que le sex-appeal d'une femme en train de vomir ait peu d'effets sur des braves gars un peu solitaires, mais pas réduits à ce genre de scène, surtout en quittant le port. Ça en fera sûrement rire, comme toujours sur un navire où des vétérans officient, mais après tout, ils étaient tous - Diavolo compris - passés par là. Un temps d'adaptation, et on reprend une vie normale. Ou presque, il est difficile d'avaler un poisson frit pendant quelques jours.

- Après, on ira voir le médecin de bord, je crois qu'il est dans l'autre couloir. Et puis je vais trouver de quoi te faire un bon grog maison, tu m'en diras des nouvelles. Tu te reposeras bien, à condition que tu dormes pour que ton corps retrouve ses forces. Tu prendras le lit, je coucherai par terre ou je me trouverai un hamac.

Il l'aida à sortir du lit et prit le chemin du pont supérieur, au centre du navire pour que le roulis du bateau soit moins important. Penchée tout de même contre le parapet, si jamais les poissons du repas voulaient chatouiller l'oesophage pour retrouver la mer...Il la laissa là, et aida à tirer la grande voile avec les autres. Il leva les bras vers le capitaine qui l'observait avec un regard curieux, alternant entre lui et Kei.

- Capitaine, un avant-goût de notre diva, cela vous conviendrait ? Comme elle est indisposée pour ce soir Le capitaine esquisse un sourire moqueur je la remplace tout en travaillant avec votre équipage ! Les gars, vous avez dans votre bordée un chanteur et compositeur, le refrain avec moi ! Hardi les gars !

Lève les voiles, camarade
La marée du matin
Nous éloigne de la rade
Sous les chants des marins

La coque perce la houle
Et le vent dans nos mains
Rafraîchit le souvenir
Le rire tendre des catins

La mer nous console
Au sein des matures
Nous volons loin du sol
Sur les vagues de l'azur

Lève les voiles, camarade
La marée du matin
Nous éloigne de la rade
Sous les chants des marins

C'est le froid, c'est le sel
Notre pain quotidien
C'est la vie solitaire
Qu'on réchauffe en nos mains

Le bosco dans la nuit
Hurle et crie "TEMPÊTE !"
Les matelots endormis
Tiennent la barre dans la fête

Entre les éclaircies
Le rhum coule souvent
Les hommes boivent à la vie
A l'amour et au vent

Lève les voiles, camarade
La marée du matin
Nous éloigne de la rade
Sous les chants des marins

Après quelques répétitions, l'équipage suivit Diavolo sur le refrain et les couplets. Même le capitaine chanta les refrains après un certain temps, et le navire prit le large au son de la nouvelle chanson de l'équipage d'Hawkins, tandis que Kei relâchait le contenu de son estomac à la mer.

Jus de fruit, distillé.

Même nauséeuse, le chant m'entre dans la tête. Une fois la voile hissée, le navire prend en vitesse. Cette constatation me rassure : plus nous allons vite, plus nous nous éloignons de ce mauvais temps. Par contre, avec cette vitesse, le fracassement des vagues sur la coque est plus violent. Beuuuh.. Je renvois encore une fois le contenu de mon estomac. C'est absolument abominable. De l'eau, il faut que je boive. A force de respirer fort et de me prendre le vent en pleine face, le contour de ma bouche est devenu sec et salé. Horreur.. De l'eau. Secouée par la houle à chaque pas, et par peur de renvoyer encore une fois ma bile, j'avance presque à tâtons à la recherche de ce précieux breuvage.
Mais où ont-ils mis cette foutu eau ?! Arrivée près de la poupe, je tombe sur un jeune marin.

- Hé toi là, dis moi où je peux trouver de l'eau.
- De l'eau ? Ne préféreriez-vous pas du rhum ? Nous en avons un cargaison de notre précédent voyage à travers les pays du Sud.

Rhum ? C'est quoi ça ? Bon, un truc à boire j'imagine. J'ai tellement soif que j'accepte sans chercher plus d'explications. Le marin me fait m'asseoir sur le bord d'un gros tonneau rond et s'en va pour ramener quelques secondes plus tard une bouteille sale contenant un liquide ambré. Un jus de fruit ? Bonne idée, n'ayant rien mangé mis à part du poisson quelques heures plus tôt avec Diavolo, une boisson sucrée n'est pas de refus. Me retenant d'une main sur le tonneau à cause de la houle, j'attrape la bouteille que me tend le marin et la porte à ma bouche, buvant à grande gorgée. Le regard hagard du marin me fait comprendre que ce que je viens de faire n'est pas exactement ce à quoi il s'attendait. Ouuhhh.. Le temps de sentir ma gorge brûler littéralement, il est trop tard. De l'alcool ?! Je recrache la moitié de la dernière gorgée et respire à pleins poumons en toussotant.

- Madame, ça va ? A vous voir comme ça, on pourrait croire que z'êtes pas d'ici ! Et z'avez une sacrée descente !

Eh merde, j'en ai même oublié mon rôle de diva. Ma gorge me serre toujours autant, et ma voix à moitié cassée quand je réponds, le plus hautainement possible afin de remettre le marin à sa place.

- Ca, c'est à cause de la houle. Et en effet, je ne suis pas d'ici, mais du continent, où nous n'avons pas le pied marin. Repasse-moi la bouteille veux-tu ?

Mais pourquoi je dis ça moi ? En fait, cet alcool n'est pas si déplaisant. Contrairement au sake, il a plus de goût, et tiens.. plus chaud. Bientôt, je sens clairement mes joues devenir toutes rouges et les nausées me passent. Oh ! Mais c'est magnifique ça ! Vive le rhum ! Le marin prend congé une fois que nous ayons fini la bouteille et bien ri, enfin, je crois. Doucement, je me remets sur mes pieds. Oulaaah, ça tangue. Mais toujours aucune nausée. Bizarre, ça tangue dehors et dedans, youuuh. Mince je suis une diva. Essayant tant bien que mal de prendre un air digne, et réprimant mes hoquets je retrouve avec un peu de mal, certes, la petite chambre. Ohhh, un lit. Couchée en travers du matelas soudain très accueillant, je ferme les yeux une seconde pour me remettre les idées en place. Je crois bien louper le dîner de ce soir..

Les manoeuvres ont payé, le navire a pris de la vitesse et s'éloignait des nuages menaçants. Encore quelques cordages à assurer et il retournerait voir Kei, espérant qu'elle aille mieux. Le temps allait se dégager pour la nuit, mas la houle serait tout de même assez forte pour lui donner des hauts-le-coeur. Il la vit parler avec un marin, qui semblait soucieux de sa santé. Le rôle de la diva était plutôt bien choisi, les marins étaient attentionnés, et pas aussi intéressés qu'il l'avait prévu. Il se concentra sur ce qu'il faisait, détourna le regard au moment où le marin lui ramenait quelque chose.

Quelques temps après, alors qu'il demanda au capitaine de prendre congé jusqu'à repas, il se mit à chercher des yeux la diva. Aucune trace sur le navire...zut, il ne l'avait pas vue repartir dans la cabine. Elle avait sans doute voulu retourner dormir, et ça irait mieux demain. Il décida d'aller se changer tout de même sans faire de bruits, et entra dans la cabine. Il vit un spectacle étonnant et amusant, Kei couchée étrangement sur le lit, habillée, les joues rouges, un ronflement d'ivresse bien entamé. Il s'approcha de sa bouche qu'il renifla, pour la curiosité. Oh oh...elle avait pris de l'avance sur le grog, n'ayant sans doute qu'un ingrédient à sa disposition. Bon sang, ça sentait bon le rhum agricole ! D'accord d'accord. Au moins, ça avait calmé son mal de mer, elle allait dormir comme un bébé. Discrètement, il lui enleva sa parka verte, la coucha normalement, la tête sur le côté pour éviter les vomissements mortels. Il la recouvrit d'une couverture et amena un seau en bas du lit si elle se réveillait pour vomir.

Profitant du fait que la jeune fille était bien endormie, il en profita pour se changer comme il avait l'habitude depuis qu'il avait ce fruit. Il fit disparaître ses vêtements en activant ses ténèbres. Ils disparurent, le laissant complètement nu pendant un instant, jusqu'à ce qu'une chemise en un pantalon noir, ainsi que des chaussures en cuir noir viennent le recouvrir. Il ajouta une veste plus décontracté que son costard habituel et alla prendre un apéritif avec les marins avec qui il avait travaillé tout à l'heure, jusqu'à l'heure du repas avec le capitaine Hawkins.

A l'heure dite, il toqua à la porte du capitaine. Son second ouvrit, et le fit entrer dans une grande cabine située à la poupe du navire. L'endroit était bien spacieux, avec un grand bureau, une table pouvant accueillir six personnes, un lit double, une armoire et une étagère. Le repas fut apporté par le coq de l'équipage tandis que Diavolo prit place entre le second et un quartier-maître. Par rapport à la nourriture servit aux matelots, il y avait une certaine différence. Les gars là-bas avaient eu une sorte de bouillie avec des mollusques, ici on mangeait de la viande ramenée avec une sauce aux algues, ou ce qui y ressemblait dans ce monde.
Les discussions allèrent bon train, sur la sécurité des mers, des villes d'escale, sur la vie quotidienne de l'équipage et ses revendications. Le capitaine tranchait dans le vif dès qu'un de ses hommes émettaient une critique. Autorité respectée, voire crainte, selon Diavolo. Il n'osa pas participer à ces discussions, pas avant d'avoir bu un litre à lui seul, comme chacun des hommes présents. L'alcool l'ayant rendu assez farouche, il commença à poser des questions, ce qui installa un climat différent, composé de légères tensions dans l'air.

- Dites, j'ai un peu parlé avec votre patron, et il ne m'a pas dit ce que vous transportiez. Une petite idée de ce qui se trouve sous nos pieds, allez ! Je mise sur un peu d'alcool, des teintures, peut-être quelques richesses, qui sait...des coffres ? Allez, capitaine Hawkins, dites-nous tout !

Le silence se fit autour de la table. Le capitaine regarda Diavolo avec un air de colère retenue, mais de mise en garde. Autant lui placer un couteau sous la gorge et lui dire d'arrêter de poser des questions. Le second perça le silence et proposa des cigares avec un verre de whisky. Acceptant volontiers, Diavolo écouta les discussions diverses, tout en notant l'air inquiet qui les prenait tous, lorsque Diavolo leur souriait. Il était peut-être un peu éméché, mais pas assez pour ne pas voir que quelque chose clochait sévèrement. En revenant un peu sur l'armateur, il lui semblait bien que lui et ce cher Hawkins étaient nerveux en le voyant arriver sur le port. Personne ne lui avait dit ce que cachaient les cales, et visiblement il ne fallait pas en parler...il prit assez rapidement congé de ses hôtes, les remerciant mille fois d'avoir accepté la diva parmi eux, qui les récompensera grassement à l'arrivée.

Il alla vers les dortoirs, où les matelots qui n'étaient pas de garde passaient leur nuit à jouer et à boire, à se battre et se raconter des histoires. Certains faisaient une partie de carte avant de prendre leur quart, les autres buvaient en riant, sachant qu'ils iraient se coucher bientôt. Diavolo se posa deux heures avec eux, buvant verre sur verre, encourageant ceux qui montaient sur le pont. Il chanta avec eux, il fit des concours de bras de fer suivi de l'alcool. Le coq arriva avec des mollusques remplis de sucre crémeux, un peu caramélisés, et en donna à tout l'équipage. Les marins qui revenaient du pont participèrent aussi aux réjouissances, si bien qu'au milieu de la nuit, la plupart d'entre eux dormait à même le sol, les tables, à moitié sur les lits ou dans les escaliers. Diavolo, chantant d'une manière monotone une seule note avec le coq qui ronflait sous son bras, décida qu'il était temps de rentrer.

Droite, la première à droite, encore à droite, cinquième porte à gauche ensuite, et dodo. Tiens, un escalier pour descendre rejoindre Kei. Ne pas faire de bruit surtout, elle ne lui pardonnerait pas ! Descendre dans le noir, descendre encore...attention aux vagues ! A un moment, le noir complet envahit son champ de vision. Il fit sortir son briquet ainsi qu'une cigarette, et commença à fumer en tenant son briquet d'une main. Il erra pendant vingt minutes dans divers couloirs sombres, jusqu'à arriver devant une grille. Derrière cette grille, une tête d'homme apparut dans le noir. Ivre et joyeux, Diavolo n'était pas préparé à ça et lâcha le briquet. Voulant le ramasser, il s’assomma contre la grille, ce qui le fit hurler comme un dément. Alors, des voix se firent entendre dans le noir. Beaucoup de voix qui disaient "monsieur !"

- Putain, mais c'est un bordel ici ! Qui êtes-vous !

Finesse et élégance au programme, évidemment. Il retrouva son briquet, l'alluma et parcourut la grille, de la poupe à la proue. Il alla du côté tribord du navire et fit la même chose pour trouver les mêmes grilles, avec des têtes collées derrière. Bon sang, cet enfoiré d'Hawkins...Diavolo se mit à rager au sujet de la mystérieuse marchandise, se ralluma une cigarette quand il sentit un énorme choc sur le creux de sa tête. La cavalerie était arrivée pour défendre son bout de gras. Il tomba, fit mine d'être assommé pour de bon, se mordit les lèvres pour ne pas crier à cause de la douleur. Il entendit la voix du second et d'Hawkins diriger des mains qui le traînèrent derrière les grilles. Il entendit donc clairement le capitaine le traiter de sale fouineur, et un marin exprimer certains désirs vis-à-vis de la diva. Demain matin, conclut le capitaine. Les voix remontèrent dans le noir, tandis que la marchandise se mit à chuchoter et à le fouiller. Houla...Diavolo prit conscience de l'odeur nauséabonde des lieux.

Cette gentille expérience le fit dessaouler plus vite que prévu. Se relevant, il écarta les barreaux avec la gravité - son briquet fidèle éclairant - et les replaça correctement. Il mit une demi-heure à remonter sans croiser personne, puis ferma sa cabine délicatement sans faire de bruit. Il ferma la cabine à clé et prit la clé dans son corps. Il fit sortir un stylo de son doigt et écrivit sur une feuille, qu'il laissa clouée à la porte grâce au stylo : "ne sors pas et réveille-moi dès que tu es levée. Urgence !"
Puis il s'endormit comme une masse à même le sol. Trop d'alcools et de révélations en une seule soirée...il fallait prendre des forces pour la grosse journée de demain. Dodo sur le plancher de ce rafiot de malheur, à demain pour de nouvelles aventures très chocolatées.

Gueule de bois.

Mais.. C'est quoi ce bruit ? J'ouvre les paupière difficilement, les faibles rayons de l'aube qui passent à travers le hublot m'agressent à un tel point.. Et ce mal de ventre.. J'ai soif. Mal à la tête aussi. Ohh.. Je m'assois sur le bord du lit et m'agrippe la tête de mes mains. Ah oui, le rhum. Plus jamais, ça, c'est certain ! Et puis, pourquoi j'ai plus ma parka moi ? Et d'où elle sort cette couverture ? Raaah, pas moyen. Mais p*tain c'est quoi ce bruit ?! Je baisse la tête et vois Diavolo, étalé de tout son long dans la petite cabine, ronflant à même le sol. Visiblement, je n'ai pas été la seule à profiter des joyeusetés du navire hier soir ! Je lui tapote le coude du bout du pied pour voir sa réaction. Juste un tortillement, et rien. Bon, il est pas près de se lever.

Mon ventre gargouille. Là, je ne sais pas quoi faire. Manger et vomir ou ne pas manger et me sentir mal ? Dans tous les cas, je me sentirai mal, alors autant ne pas gâcher de nourriture. En tout cas, j'ai toujours aussi soif, et je veux de l'eau cette fois-ci ! Allez, on pose un pied, et un deuxième. Je guette la houle avec une grande frustration. Si en plus j'ajoute le mal de mer à mon état, ce sera la fin. J'attends, encore. Mais rien. Rien ?! Étonnée, je fonce chercher une explication à travers le hublot. Wouaaahh.. L'horizon totalement bleu. Alors c'est ça, être perdu au milieu de l'océan ? Il faut que j'aille voir ça du pont ! Je sautille à travers le corps de Diavolo encore endormi et appuie sur la poignée. Bloquée. Qu'est-ce que c'est encore que ce truc ? Pourquoi c'est bloqué ? Que s'est-il encore passé ? Je relève la tête de quelques centimètres et voit un mot. Oulah, visiblement, c'était agité hier soir.

Comment se résoudre à réveiller un si bon dormeur ? Assise depuis quelques minutes déjà sur le lit, j'attends patiemment que le pirate s'arrête de ronfler. 'Ce doit être un piège, il doit préparer un complot'. Qilin. Son murmure me fait repenser à notre dispute de la veille. Il est temps de s'expliquer, mais hors de question que les oreilles de Roucky entendent ça. Allez hop, en tailleur et méditation pour rapprocher les esprits et les cœurs. Je serre Qilin contre moi, je ne peux expliquer pourquoi, mais cette marque d'affection m'importe beaucoup.

Mon Monde Interieur. Ca fait un bail dis donc ! Même dans mes songes, je n'y accède plus. Et le voilà, ce fameux camarade. Froid et distant, comme d'habitude.

- Mieux vaut loucher que d'être aveugle, et j'ai l'impression que tu es une aveugle qui louche, pauvre gamine.

Je souris à cette remarque. J'ai cru comprendre, oui, que ma lame n'appréciait pas le pirate. Nous avons un langage propre et particulier, qui fonctionne souvent par énigme. Une affinité acquise au fil des années. Certes, très peu courtoise, mais je l'adore pour ça. La conversation sera longue, et très certainement tendue. Et pourtant, contrairement à ce à quoi je m'attendais, elle est simple et vite réglée. Il a eu le temps de réfléchir ces dernières heures. Bien.

Diavolo dort toujours, et le soleil commence à monter. Il a sûrement assez dormi. Doucement, je me baisse et m'accroupis à côté de la tête du ronfleur. Je pose la main sur son épaule et secoue légèrement en l'appelant.

- Hé, Rou.. euh, Diavolo ! Debout, debout ! C'est quoi ce mot ? Debout !

Je secoue de plus en plus fort, mais rien n'y fait. J'hésite à le frapper, mais d'après ce que je sais, il souffre beaucoup plus qu'une personne normale lorsqu'on lui inflige une douleur. Confer : quand je lui suis tombée sur la tête. Pfff.. Agacée, je m'assois sur le petit espace libre au sol, cherchant une solution. Et ce ronflement, ça m'éneeeerve ! Oh ! Petit ricanement et voilà que je lui bouche le nez en lui fermant la bouche. Vieille farce de par chez nous. Impossible qu'il ne se réveille pas alors que je l'étouffe à moitié, enfin, étouffement gentil hein. J'attends, mais rien. Je n'ose pas lui couper l'air plus longtemps, par peur de vraiment le tuer. Bon, il est chatouilleux ? Voyons voir ça, mais si ça ne marche pas, c'est une bonne claque en guise de réveil !

Ça y est, il est enfin devenu un homme. Il tient un bar avec sa femme, et il chante le samedi soir dans un coin, pour une poignée d'habitués et le centre social du coin. Il a un de ses gamins à la guitare, un autre à l'harmonica. La fille gère les comptes, tandis que madame la patronne, la reine-mère, valse entre les tables des amis pour servir les boissons, au rythme chaloupant de la musique. Le bar est chaleureux, a des parfums marins, la marée par grand vent, qui claque contre les fenêtres. Deux enfants écoutent près de la cheminée et ils enfoncent leurs doigts pointus dans ses cotes. Attends...qu'est-ce qu'ils font ces mioches ? J"vais les claquer, moi, et devant leurs parents ! Même pas peur !

Réveil brusque d'un Diavolo qui saisit la main qui tendait à le chatouiller, manquant d'air en prime. Droit sur la tête d'une Kei qui semblait bien mal en point, encore que sensiblement plus en forme que la veille. Il la regarda les yeux mi-clos, émergeant d'un rêve magnifique, et bailla longuement en s'étirant et en s'ébouriffant les cheveux. Il tâta de son début de barbe naissant et demanda d'une voix grave et mise sous presse par l'alcool enfin digéré.

- Bien dormi, la diva ?

Il regarda par le hublot. Soleil assez avancé dans la matinée, il avait donc bien dormi. Pas étonnant avec la nuit d'hier, même s'il ne se souvenait plus de ce qu'il avait fait après le concours de bras de fer. Il avait été obligé de boire vu qu'il ne pouvait pas montrer sa vraie force à un équipage normal, et surtout en pleine mer. De quoi foutre du monde à l'eau, ou se voir foutre soi-même dedans. Et ça, Diavolo et son Fruit n'apprécieraient guère..

.

- J'ai le souvenir d'un truc hyper important, mais impossible de mettre un mot dessus.

Il leva la tête et tomba sur le bout de papier accroché à la porte. Oui il avait le souvenir de ce mot, mais il l'avait écrit...pour un truc caché dans la cale. Des têtes vues dans son rêve, des têtes qui le suppliaient, avant qu'il n'entre au bar, chez lui. Des visages émaciés qui sentaient la pourriture et la douleur. Des figures qui réclamaient à la limite qu'on en finisse vite avec eux. L'odeur lui revint à l'esprit très clairement, si bien qu'il se pencha sur le seau et toussa longuement, sans que rien ne vienne le soulager en sortant. L'odeur s'incrustait pourtant en lui, comme un venin, et il se mit à se tortiller dans tous les sens, à moitié allongé, se prenant la tête et le nez. Quand enfin il réussit à parler, ce fut pour être interrompu à la moitié par des coups polis frappés contre leur porte.

- Hier, j'ai pas mal bu, et je suis descendu aux cales. J'ai vu...

Toc. Toc. Toc. Diavolo se mit à murmurer.

- J'ai vu des humains...des hommes et des femmes entassés dans une prison...ils font du trafic d'humains, et ils savent que je sais, maintenant. Je me suis laissé prendre, puis je me suis évadé. Ils ne doivent pas savoir où je suis...au fait, ils ont dit qu'ils s'occuperaient de toi, et l'un d'eux veut ton corps d'une manière que t'aimeras pas.

Toc. Toc. Toc.

- On fait quoi ? On fonce, on se laisse faire, on négocie ? Le capitaine ne va pas nous laisser partir comme ça.

Contrôle de soi.

Il a pas mal bu ? Bon, on est deux visiblement. Impossible de râler, même si l'envie ne manque pas, ce serait bien trop hypocrite. Ah voilà, de l'eau ! Je n'avais même pas pensé à regarder dans cette espèce de cruche qui traînait depuis notre arrivée. Y pas de verres ? Regard curieux. C'est peut-être pour faire sa toilette ? Petit reniflement histoire de voir si c'est bien de l'eau, puis me débarbouille pendant qu'il parle.

Je sursaute en entendant toquer à la porte. Qui c'est ? Sûrement rien de bien bon, étant donné le murmure de Diavolo qui s'en suit. Plus j'en entends, et plus je sens que mon esprit perd le contact avec la réalité. Un trafic d'humain. Mon cœur s'emballe. Je n'entends même pas le reste des paroles du pirate. Mes oreilles me sifflent et ma respiration se gonfle, j'en ai presque la tête qui tourne. Une traite d'humains, cette vision me donne l'impression d'être entrée en Enfer. Et le pire, un humain qui traite des humains. Même un Hollow a l'air bien plus gentillet par rapport à ça ! Enfin bon, c'est le rôle d'un Hollow de ne pas être très sympathique avec les humains. D'ailleurs, y at-til des Hollow ici ?! Je n'en ai pas croisé pour l'instant, mais peut-être ne puis-je plus les voir, les ressentir ? Trop de questions.

On retoque à la porte, ce qui me fait reprendre contact avec la réalité. Qu'est-ce qu'on va faire ? Mon sang ne fait qu'un tour. Regard noir à Diavolo. Il ne le mérite pas, mais mon air dur a pris le dessus dès qu'il m'a parlé de cette histoire d'esclavagisme. Je me lève et file droit vers la porte, faisant signe à Diavolo de se cacher dans un angle mort pour les nouveaux arrivants. Un soupire et hop, un grand sourire. Main sur la poignée. Ah, oui, elle est fermée. Bon. Je force un peu et crac, porte cassée, certes, mais ouverte.

- Que puis-je pour vous messieurs ?
- Où est ton garde du corps ?
- Qu'est-ce que j'en sais, si vous ne savez même pas où se trouvent les gens à bord d'un navire, comment faites-vous pour vous retrouver au milieu de l'océan ?! Et quel est ce manque de respect..?
- Ferme-la, catin, tu vas voir ce qu'on fait aux garces comme toi !

Il tend la main vers moi pour attraper ma parka mais son visage vire au violet la seconde d'après. Et oui, ça ne doit pas faire plaisir de se prendre un fourreau en plein estomac. Qilin aussi est à fleur de peau, si on peut dire ça comme ça ! Ses convictions sont encore plus tenaces que les miennes. Serrant les dents, j'envoie le marin valser grâce à un agile coup de pied au niveau du bassin et m'attaque ensuite au second, qui a reculé par surprise. M'approchant, je le prends par le cou, le soulève et l'étouffe à moitié contre l'un des murs en bois vernis du couloir. Eh oui, qui aurait pu penser que mes petits muscles puissent avoir autant de puissance ?

- Le Capitaine est au courant pour ce qui se trafique ici, j'imagine.
- Ehh.. Ou.. Oui.
- Où est-il ?
- Dan..Dans ses ap.. appartements.

Il a du mal à parler, et pour cause, ses pieds ne touchent plus le sol. Je serre les doigts de plus en plus, ayant l'intention d'arrêter lorsque je ne sentirai plus son poul, mais Qilin me susurre que ca gars-là n'est qu'un pantin. Je soupire, baissant la tête et fermant les yeux pour lâcher prise. Cette haine ressemble fortement à celle que j'éprouve pour les Quincy. Le Capitaine pourrait facilement être l'un des cousins de ces porcs. Bon, Qilin, c'est décidé.

- Bon, Roucky, on fonce dans le tas. On les démonte, on les démembre, on fait ce que tu veux mais aucun de ces ordures ne doivent échapper aux portes de l'Enfer.

Yooouuhouuuuu...Diavolo passait une main devant Kei, qui semblait ailleurs après la révélation au sujet d'une certaine marchandise vivante. Il avait prévu une réaction, mais que faire si la fille fondait en larmes, trouvait ça horrible, voulait faire des pétitions pour la paix et contre la faim...Ah, retour à la réalité. Le regard de la jeune diva en plein dégazage (argot vulgos pour dire dessaouler) le foudroya littéralement sur place, comme si c'était lui le capitaine. Okay, fallait pas déconner sur certains sujets avec Kei, bien reçu. Il laissa faire la suite avec une certaine surprise, non sans amusement aussi, quoiqu'un peu inquiété sur la fin.

Tandis que la jeune fille démontait les marins qui étaient venus la chercher, il soupira, fit sortir une cigarette, l'alluma et entendit la dernière phrase du matelot, suivi du choc du combat. Cela ne dura pas bien longtemps, Diavolo fut assez impressionné par la technique sans failles de sa camarade. Le pauvre marin étouffait, pas loin de lâcher l'ancre dans la crique de la mort. Quand la furie le lâcha, Diavolo alla tapoter sur la tête du gars, avant de l'assommer pour de bon. Juste retour des choses après une défaite volontaire au bras de fer. Typiquement masculin, lâche et puéril, mais ça soulageait Diavolo. Autre chose le soulageait dans le même temps : il était en train de lâcher les flammes noires sur tout son corps, et commençait à ressentir l'excitation de son pouvoir. Kei y était pour quelque chose, car il y avait quelques temps qu'il n'avait pas combattu en compagnie d'une personne proche ou apparentée comme telle.

Kei se tourna vers lui, résolue et décidée. Le mal de mer était passé au bon moment, et il était temps de casser quelques nez. Au mieux. Il se mit au garde-à-vous, à moitié amusé, la cigarette sur le côté, puis la regarda en faisant une grimace sérieuse.

- A vos ordres, capichef !

Il sortit de la cabine, attrapa le premier marin qu'il croisa. Il colla sa main contre son visage, qui disparut tout à coup. Puis Diavolo l'enveloppa de ténèbres et le marin disparut avec les flammes qui revenaient sur le corps de leur contrôleur. A l'extrémité du couloir, un groupe de marins avançaient armés. Diavolo prit la largeur du passage pour bloquer toute tentative de Kei d'intervenir jusqu'à ce qu'il ait fini.

- Boulet Humain ! Attention les quilles !

Les flammes noires formèrent un pilier à l'horizontale, expulsant le marin disparu du corps de Diavolo à une vitesse folle. Il frappa le groupe de plein fouet alors qu'il pleurait et tremblait, les renversa et en assomma quelques uns. Pauvres types...Diavolo se tourna une nouvelle fois vers Kei et fit un signe de salut avec deux doigts.

- Allons défoncer ce capitaine de malheur. Après toi.

Libération.

Va falloir qu'il m'explique un jour commence marche son truc de flammes noires. Enfin, si lui-même le sait. Le pirate a l'air de bien s'éclater en tout cas, je suis obligée de lâcher un sourire en l'observant. C'est comme quand on offre une nouvelle balle à un gamin et qu'on l'emmène sur un terrain. Mais je suis quand même surprise : il n'a pas l'air choqué par le trafic qui se passe en-bas. Bon, il a dû en voir d'autres, ou bien n'a-t-il aucune considération pour ces gens.. Ca j'en doute, quoi que ?

Bref, c'est parti. L'avancée dans les couloirs est assez rapide, chaque marin qui s'interpose termine assommé contre l'un des murs de bois vernis. Un coup de fourreau par ci, un poing par là.. Qu'ils sont nuls ces humains.. Je ne prends pas la peine de sortir Qilin de son fourreau ni même de le desceller. Au bout de quelques minutes, je laisse Diavolo prendre de l'avance : c'est bien beau de me laisser passer devant, mais je ne sais pas où elle est, moi, la cabine du Bouffon !

Au fur et à mesure que nous avançons et que le nombre de marins à intervenir augmente, je me pose quelques questions : la plupart d'entre eux seront incapables de tenir debout pendant quelques mois au moins, alors comment on va faire s'il n'y a pas assez de monde pour s'occuper du bateau ? Une idée un peu folle me traverse l'esprit, peut-être que certains des prisonniers pourront remplacer les marins ? Ah, un escalier qui descend. J'ai un peu de mal avec la notion de priorité : la logique aurait voulu qu'on règle son compte au Capitaine, et qu'ensuite nous allions voir les captifs. Bien entendu, moi voilà en train de dévaler l'escalier. Je jette un regard en arrière pour voir si Roucky me suit, mais il n'a pas dû voir mon changement de direction, il était alors occupé avec deux marin. Certes, j'aurai dû rester avec lui, mais je me sens obligée de descendre voir, au moins, comme pour me prouver à moi-même que la situation est bien réelle.

Les cales. Sales, sombres, et puantes. De quoi donner la chair de poule au guerrier le plus aguerri. Même l'air donne l'impression de souffrir ici, et les murmures qui s'échappent des espèces de prisons n'ont plus rien d'humain. Je m'approche du fond, et fléchit les genoux pour me retrouver à la hauteur des ombres crasseuses aux yeux brillants. Le temps de m'habituer au peu de clarté, j'arrive à distinguer des visages, des corps. Certains sont mutilés, d'autres presque en train de pourrir littéralement. Qilin l'a très mauvaise, mais se contient au maximum pour ne pas effrayer les prisonniers. Leurs yeux expriment terreur et interrogation. Quoi de plus normal ?
Des murmures plus prononcés enveloppent l'espace puant. Qui est-ce ? Qu'est-ce qu'elle va faire ? Pourquoi elle est là ?
Mais qu'avais-je dans la tête en descendant ici ? Ouvrir les grilles en criant « Volez, petits oiseaux ! », faire comme les héros des bandes dessinnées ? A présent, je n'ai qu'une seule envie : prendre la fuite. Mais ce n'est pas possible, pas correct. Ouvrir les grilles est indispensable mais comment éviter une émeute, et contrôler tous ces passagers 'clandestins' face au reste de l'équipage ? Là, je pense que Diavolo aurait sûrement le discours parfait pour calmer les mœurs, lui et sa tchatch !

- Tu viens pour nous sauver ?

Hein, quoi ? Surprise par la petite voix qui vient de briser les murmures, je cherche des yeux le corps à qui elle appartient. Une petite fille, d'à peine 4 ou 5 ans. Les cheveux en bataille, elle s'était approchée de la grille pour mieux m'observer, les mains tenant fermement les barreaux.

- Euh. Je.. Euh.. Pas vraiment, enfin.. Euuuhh. Si mais, euuhh..

Claque psychologique. Allez Kei, debout, réveille-toi un peu ! Du sérieux !

- Bon, ça suffit. Ecartez-vous, je vais ouvrir. Faites attention aux matelots en montant, je vous montre le chemin, une seconde. Est-ce qu'il y a des blessés ? Transportez-les dans les cabines au niveau supérieur, il faut des soigner. Des morts.. Rassemblez-les, on verra ce qu'on fera d'eux plus tard.

Pendant que je parle, je force les serrures sans encombres. Contrairement à ce à quoi je m'attendais, tout le monde s'exécute avec calme. Ils s'entre-aident les uns les autres, supportent le poids des blessés, encadrent les enfants.. Moi qui avais déjà imaginé l'anarchie la plus totale ! Bouche bée, je sens une pression contre ma jambe droite. La gamine s'accroche à mon pantalon. Je soupire puis la prends contre moi avec mon bras gauche, laissant au droit un libre mouvement au cas où.

Bon, il est temps de remonter. Je passe devant, essayant de me rappeler avec le plus de précision possible le chemin pour arriver au niveau des cabines secondaires comme celle que nous avions avec Diavolo, mais tout le monde connaît mon sens de l'orientation...

Rixe de couloirs dans un bateau. Les marins ne comprenaient pas ce qu'il se passait, mais ils tapaient la personne qui tapait le copain de dortoir. Pour peu qu'un marin trébuchât sur un autre, la cible changeait de camp. Les dortoirs se vidaient rapidement au son des poings et des gueules cassées gémissantes, et certaines victoires rapides étaient à mettre au compte de l'alcool de la veille, encore en moteur dans le sang de quelques uns. Diavolo tapait, utilisait la gravité pour alourdir ses poings de flammes noires, transformait la masse des corps selon son envie de l'instant, si bien qu'il lui arrivait quelquefois de faire littéralement voltiger un marin à travers l'endroit. Après avoir imposé un silence forcé, il regarda autour de lui, sans repérer Kei. Il lui semblait, après réflexion, qu'elle était à côté de lui pendant l'escarmouche, mais elle demeurait désormais introuvable. Dans le doute, il prit la direction de la cabine du capitaine. Il toqua gentiment, personne ne répondit. Un officier de bord arriva du pont supérieur et se stoppa en le voyant devant la porte. Diavolo se précipita sur lui, lui mit une main sur la bouche et le fit entrer dans la cabine de force, en défonçant la porte. Il le prit par les épaules et l'envoya valser contre la commode, qui s'effondra sur le choc. Le type fonça sur lui, Diavolo utilisa la gravité pour l'attirer vers son poing et saisit de nouveau l'officier par les épaules pour l'envoyer contre la table. L'autre bascula avec la table et les restes d'un repas, se cogna en un bruit sourd contre quelque chose de dur et ne bougea plus. Diavolo s'approcha, intrigué, et vit le pauvre homme allongé sur le sol, un filet abondant de sang lui coulant du crâne. Contre sa tête, un petit coffre noir trônait fièrement parmi des planches de bois qui était auparavant une petite commode discrète. Il prit le petit coffre sous le bras, fit le chemin jusqu'à sa cabine, en enjambant les corps de marins - et en redonnant des coups assommants aux premiers remis. Il déposa le coffre dans un coin, puis ressortit vers le pont supérieur.

Il fut accueilli à la sortie par des pistolets et des sabres d'abordage, des lances et des couteaux. Le capitaine Hawkins commandait une manœuvre, un fusil occupant ses mains. Diavolo s'approcha, des lances lui transpercèrent son ventre de flammes noires et disparurent dans son corps. Les hommes les lâchèrent avant d'être happés à leur tour.

- Capitaine Hawkins...la nuit fut courte, n'est-ce pas ? Heureusement, rien ne vaut l'air marin de bon matin. Ne croyez-vous pas que nos amis des cales pourraient eux aussi en profiter ? Je crois qu'il serait judicieux de les laisser profiter de ce magnifique soleil.

Il s'approcha du capitaine, faisant reculer les marins un peu effrayés. Il était désormais recouvert de flammes noires, ne laissant que ses yeux verts de visibles, et il utilisait la gravité pour alléger les corps. Lui flottait dans les airs, mais les marins autour étaient en train de s'accrocher pour ne pas tomber. Le capitaine leva son fusil vers lui, Diavolo mit la main devant le canon quand Hawkins fit feu.

Diavolo retourna au sol, avec tous les marins. Un cri de victoire s'arracha du capitaine, suivi par ses seconds et quelques matelots. Son adversaire de flammes noires se tenait sa main, noire de flamme, en hurlant et en gémissant. Puis il se releva, se dressa de toute sa hauteur, et d'une voix furieuse, hurla pour tout le navire.

- Yami Hana Michi !

Les flammes noires s'étalèrent sur le navire, en tapis d'ébène de feu sur tout le pont supérieur. Petit à petit, les premiers marins pris dedans s'enfoncèrent comme dans des sables mouvants, et se mirent à hurler. Hawkins écarquilla les yeux, terrifié.

- Ne vous inquiètez pas, capitaine. Je les fais juste descendre à la cale. Mais c'est pas dit qu'ils remontent...

Affrontement.

Plus nous nous rapprochons de la surface, plus le nombre de corps endoloris et assommés que nous croisons augmente. Diavolo n'y est pas allé de main morte, je m'en veux un peu de l'avoir planté pour descendre aux cales. Il a certainement bien dû s'amuser.. Du bout du pied, je déplace des morceaux de bois qui couvrent l'un des marins, assommé lui aussi. Et tellement jeune.

Coups de feu et hurlement retentissent jusqu'aux entrailles du bâtiment. Les anciens prisonniers s'accrochent les uns aux autres, pris de panique. Je les quitte en leur laissant quelques instructions, puis prend la direction de l'extérieur en vitesse. Arrivée presque en haut, je ralentis le pas et ouvre délicatement la porte menant au pont, me faufile entre tonneaux puis m'efforce de m'accrocher à un filet plus en hauteur, surprise par ce qui se promène au sol. C'est quoi ces flammes noires partout par terre ?! Portant mon champ de vision un peu plus loin, j'assiste à l'aspiration des marins. La question qui se pose à présent est : où vont-ils atterrir ? Aucune idée, et en fait, je m'en fiche un peu. Je viens juste de repérer le Capitaine. Ouuuh, mais c'est qu'il a peur ?

Une fois les marins totalement aspirés, le pont est déjà beaucoup plus calme. Comme si les précédents événements n'avaient jamais eu lieu. Je descend de mon petit filet et m'avance en direction des deux hommes qui se sont face. Enfin, du pirate effrayé et de l'amas de flammes noires serait plus exact. Mes pieds se posent sur la balustrade. Il aurait été plus simple et plus rapide de redescendre totalement, mais je n'en ai pas envie. La vision du Capitaine me dégoûte, son visage effrayé m'amuse beaucoup, alors pourquoi ne pas jouer avec lui plus longtemps ? Déambulant sur la rambarde comme une gymnaste sur sa poutre, je m'approche d'eux, un sourire crispé aux lèvres.

- Alors, Messieurs, on s'amuse bien à ce que je vois ?
- Hein.. quoi.. Mais, toi aussi ?!
- Il est très peu sage d'accepter la compagnie d'inconnus sur son navire, Capinul, surtout quand on fait du trafic d'être humains.. Franchement, vous pensiez vraiment que ce trajet se passerait bien ?
- Ce sont des prisonniers politiques, des voleurs et des escrocs !
- Ce sont aussi des humains, et une âme aussi pourrie soit-elle n'a pas à en contraindre d'autres.

Assise le garde-corps, les pieds ballants avec un visage à présent empreint à un dégoût profond, je fixe le marin alors qu'il essaie de comprendre ma dernière phrase. Pourtant, pas compliqué. Peut-être ne connaissent-ils pas la notion d'âmes par ici ? En tout cas, ce gars-là pourrait facilement donner un Hollow en puissance. Sans détourner le regard, je reprends la parole.

- Diavolo, les prisonniers des cales sont libérés, y a pas mal de gamins dans le tas... Et la plupart des marins qui traînaient dans les couloirs ont été ficelés par leurs bons soins. Maintenant, il ne reste plus que lui. Je n'ai pas vraiment pour habitude de tuer des humains, mais s'il le faut vraiment..

Je termine ma phrase en tournant la tête vers Diavolo, un grand sourire sadique, tandis que le Capitaine commence à tourner de l'oeil sous la panique. Je dois avouer que je suis un peu déçue, je m'attendais à ce qu'il soit un minimum 'courageux' ? Mais non, il est toujours là, paralysé par la peur. Il se recroqueville sur lui-même d'une façon très étrange puis se relève en éclatant de rire. Surprenant.

- Haha, si vous pensez vraiment qu'une putain et son chien puissent avoir le Capitaine Hawkins, vous vous trompez !

Et hop, un coup de fusil par-ci, un coup de fusil par là. Bien qu'assez puissante, cette arme est relativement lente.

Les marins se sont enfoncés dans les flammes noires jusqu'à disparaître. Un petit séjour du côté du monde des ténèbres leur fera le plus grand bien, à n'en pas douter. Surtout que Kei revenait de son excursion dans les cales, remontée comme il fallait pour botter par dessus bord le sale petit cul du capitaine Hawkins. Il restait tout seul, à geindre comme un roquet malade, taré jusqu'au dernier crachat, un pur rebut des océans, qui a trouvé dans un commerce dégueulasse un moyen de satisfaire l'insanité de sa pensée. Diavolo se mit à rager intérieurement, répondant ainsi à la colère vengeresse de sa camarade.

- Pour ma part, j'en ai tué un certain nombre, d'humains...parfois j'ai aimé triompher de mes adversaires, parfois je me suis trouvé horrible. Ici, je crois que j'apprécierai fortement lui tordre le cou...

Pour toute réponse, Hawkins tira partout comme un dément perdu. Les balles entrèrent dans le champ des flammes noires, pour ne plus jamais reparaître. Cette fois, l'utilisateur du Logia ne crierait pas, son fruit était pleinement développé, son corps tout entier n'était que flamme noire, flamme de gravité, insensible à ce contact physique, aussi rapide fut-il. Diavolo riposta en utilisant sa gravité pour attirer Hawkins et son fusil vers lui. Le fusil arriva rapidement à ses mains et entra entre ses deux poumons recouvert de flammes, pour ne plus réapparaître. Diavolo se calma un instant, les yeux fermés...le contrôle devenait ardu. Il se cabra vers l'avant, et une colonne de flammes explosa dans son dos, vers l'océan, rejetant tous les marins qu'il avait tenu dans son corps. Mélange de cris, de pleurs et de surprise. Un bon bain leur fera sûrement du bien. Ces pauvres gars n'y étaient presque pour rien, certains auraient été miséreux ou même morts sans ce job. Mais Diavolo ne pouvait laisser l'obéissance aveugle impunie. On lancerait peut-être quelques cordes pour les remonter, d'ici quelques minutes. De quoi les faire réfléchir.

- Kaiho ! La libération du monde...

Il fixait maintenant Hawkins sans aucune pitié palpable dans ses pupilles. Il le laissait complètement aux bons soins de Kei. Il savait, maintenant, que la jeune fille saurait trouver le moyen parfait pour s'occuper comme il se devait de cet homme abject. Il s'approcha du rebord du pont, s'assit et s'alluma une cigarette.

- Qu'on me traite de chien passe. J'ai erré sur le monde comme peu ont pu se perdre. Mais la putain fut de trop, Capitaine de rien. Si elle vous laisse en vie, sachez que je m'occuperais de vous, quoiqu'il vous arrive !